15/04/2010

Lecture

Jérôme Alexandre L’Art contemporain, un vis-à-vis essentiel de la foi Parole et Silence, Cahiers du Collège des Bernardins, n°12. 2010.
ISBN 978-2-84573-838-6

Voilà un petit ouvrage appelé à faire date dans l’histoire de l’art sacré en France vient de paraître. C’est le premier travail publié sur le sujet par un théologien. D’après l'auteur, le temps de l’Art est passé ! Il éclaire notre vision de la création contemporaine à l'aulne de la spiritualité. Voilà le commentaire sur l'ouvrage écrit par Aude de Kerros, peintre et essayiste

L’Art a atteint sa limite parce qu’il est uniquement "esthétique et formaliste", figé dans sa virtuosité et sa perfection. C’est un idéal, hors du réel. Il est peu créatif et répétitif, artisanal et conventionnel, fondé sur l’imitation pure. Il provoque un esprit de possession, une autosatisfaction, un confort, éludant les grandes questions. L’Art contemporain est, en revanche, un réel progrès. Il ne cherche pas la maîtrise et la perfection de ces objets d’art limités, fermés, achevés et morts : "L’artiste ne sait pas où il va, si non il produirait un art appliqué". La supériorité de l’Art Contemporain est dans "le processus" et non dans le résultat. L’œuvre est sans importance, elle peut être immatérielle, conceptuelle ou éphémère… ce qui compte c’est l’artiste et sa démarche. Là se trouve le cœur de l’Humain, du Réel, de la Foi. Ce qui compte c’est l’expérience du vécu, du "sensible", au sens alexandrin du terme, c'est-à-dire éprouvé par le corps et "la chair". La relation au public, entendez le "regardeur", est elle aussi "très chrétienne" car elle l’inclut charitablement dans l’œuvre d’art, le fait participer ! C’est la communion duchampienne, le regardeur fait partie de l’œuvre ! Enfin l’Art Contemporain pose la question de la vérité, il nous confronte au Réel, surtout celui que l’on ne veut pas voir, que l’on refoule, qui nous dérange. La démarche de l’Art Contemporain est morale et prophylactique. L’Art Contemporain ose montrer l’horrible, l’insoutenable, le scandaleux et nous pose question. En cela, "l’acte artistique est, plus fondamentalement qu’il ne l’était dans la seule reproduction de l’existant, un acte créateur".

08/04/2010

Carte blanche à Monsieur B.

La galerie a laissé carte blanche à un collectionneur bordelais, Monsieur B. et lui offre ses cimaises pour présenter au public les choix qui président à l'élaboration et à l'évolution de sa collection. Il a choisi des textes et des références critiques et littéraires en adéquation avec sa vision de l'art et de la possession d'œuvres, pour illustrer sa démarche et expliciter sa réflexion. Ainsi ces lignes écrites par Nicolas Charlet :
L’esthétique humaniste issue de la Renaissance fait de l’artiste un génie dont les œuvres sont irremplaçables : nées d’une pensée et d’un geste uniques et destinés à une compréhension et à une perception universelles. Ce mythe du génie créateur a été tout au long du XXe siècle questionné, malmené, voire combattu. Les avant-gardes ont largement contribué à soulever le débat. L’artiste n’était-il pas, comme tout autre, soumis au régime de la modernité avec son attirail de machines et son obsession de la nouveauté ? La production de masse imposait une certaine ironie à l’égard du génie, étendard de la tradition romantique du siècle passé. Avec le constructivisme, le futurisme et le suprématisme, la machine prend le pas sur la main, et du même coup le multiple sur l’unique. L’ère du modernisme industriel met fin à cette de la tradition artisanale et bouleverse ainsi nos schémas de pensée, y compris au plan esthétique.Malgré la secousse des avant-gardes, le mythe de l'unicum est resté intact dans la première moitié du siècle.D'une part, l'abstraction conforte alors le statut d'unicité de l'œuvre devenue pure cosa mentale ; d'autre part le système patrimonial a tôt fait de récupérer la provocation dada lui ôtant ainsi tout pouvoir de subversion.
La valeur historique remplaçant la valeur subversive. Les ready-made de Marcel Duchamp peuvent entrer librement au musée pourvu qu'ils cessent d'éreinter le mythe de l'art sacrée.Or la génération des artistes de l'après-guerre bouscule ce statu-quo. Si une immense majorité de plasticiens, dits de l'école de Paris, s'en tiennent, avec plus ou moins de bonheur, au juste milieu de la figuration et de l'abstraction dans le respect des traditions du métier d'artiste peintre, quelques-uns tentent au niveau international de fonder la forme originale d'un art contemporain.
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